Au cours des années 1970, Yvon et Chantal Contat-Grangé, deux artistes soixante-huitards partis dans le Sud, découvrent le plaisir de travailler la vigne. L’envie de s’installer les tiraille. Nous sommes alors en 1978 et il n’existe qu’un seul centre de formation continue en viticulture pour adultes, le CFPPA de Beaune. Yvon s’y inscrit.
Ne disposant d’aucune mise de départ, le couple prend un métayage dans le Pays couchois (entre la côte chalonnaise et les monts du Morvan). Le premier millésime, 1981, est difficile : les vignes sont en très mauvais état et le gel s’en mêle. Avec les 4 hectares, sont obtenus… 25 hectolitres. Travailler a coûté plus cher à Yvon et Chantal que s’ils n’avaient rien fait. En 1982, ils parviennent à acheter une maison à Dezize-lès-Maranges. Au fil des ans et des opportunités, ils prennent d’autres vignes en métayage. Le domaine actuel couvre 6,5 hectares, en métayage avec neuf propriétaires. Dans un rayon de 4 kilomètres autour de Dezize, sur onze appellations, Chantal et Yvon cultivent chaque année avec une même philosophie : « L’appellation est liée au terroir mais n’est pas acquise, chaque millésime doit la mériter. »
Leur première expérience du bio, en 1976-1977, remonte à leur incursion dans le Sud. Depuis leur installation, ils ont toujours utilisé des produits phytosanitaires compatibles avec l’agriculture biologique. Mais leurs moyens ne leur permettent pas d’acheter un deuxième tracteur. Lors des années difficiles, un seul tracteur ne suffit pas pour assurer labours et traitements en parallèle.
La Bourgogne a pour particularité d’avoir une forte densité de plantations, soit 10 000 pieds par hectare, ce qui représente une réelle complication du travail. Pour palier le manque de matériel, ils griffent entre les rangs et traitent avec un bidon sur le dos au niveau des pieds de vigne. Au début des années 2000, ils peuvent enfin acheter un deuxième tracteur, labourer et se passer de désherbant.
En 2008, ils débutent enfin leur conversion.
Très critiques sur la biodynamie, car ils trouvent « un peu farfelu » que le travail de la vigne soit « dicté par un calendrier astral », ils n’hésitent pas à dynamiser leur compost avant de l’utiliser. Au chai, ils n’ont jamais levuré. Leur matériel, très sommaire, leur interdit toute intervention technologique comme la thermovinification pour accentuer l’extraction. Il peut leur arriver, lorsque les températures sont trop basses, de réchauffer le moût pour aider au démarrage des fermentations. Ils soufrent un peu aux vendanges et au moment de la mise en bouteille.
S’ils n’ont pas acheté de vigne, ils ont investi dans les bâtiments : un gîte, mais aussi le chai, récemment agrandi pour disposer de 200 m2 de cuverie et être à l’aise pour travailler. Grâce à leur renommée, qui s’est construite au fil du temps, ils n’ont pas besoin d’entreprendre de démarches commerciales et participent à très peu de salons. Si un tiers de leur production est acheté par des particuliers, un autre tiers part à l’export, de l’Espagne au Japon en passant par l’Europe du Nord et les États-Unis.